Chroniques d'Investissement dans le Logement au Sénégal
Au Sénégal, l’accès au logement abordable est une préoccupation importante pour la population ainsi que pour les pouvoirs publics. Le déficit de logement est estimé à 300 000 dans tout le pays, dont près de la moitié à Dakar.
De plus, les données récentes compilées par le Center for Affordable Housing Finance in Africa (CAHF) montrent que les coûts de construction des maisons les moins chères demeurent hors de portée pour une grande partie de la population dans le pays. Ce qui suggère que la résolution du problème d’accès au logement abordable serait difficile sans la mise en place des mécanismes de réduction des coûts et de financement adaptés pour les ménages à bas revenus.
C’est dans ce contexte que le CAHF a lancé une étude pour aider à concevoir et à mettre en place des solutions de financement du logement qui tiennent compte des réalités propres aux ménages à bas revenus.
L’objectif de l’étude était d’établir le profil d’investissement dans le logement pour les ménages à bas revenus du Sénégal :
Il s’agissait en fait de collecter et d’analyser les données pertinentes pour comprendre comment ces ménages investissent dans leur logement et les contraintes auxquelles ils sont confrontés tout au long du processus. Les objectifs spécifiques sont organisés autour des cinq axes thématiques suivants :
- Les caractéristiques socio-économiques des ménages à bas revenus;
- Le statut d’occupation et les caractéristiques du logement;
- La décision et les motivations d’investissement dans le logement;
- Le processus d’investissement dans le logement (acquisition et sécurisation du terrain, construction, etc.);
- Les financements utilisés ainsi que les principaux obstacles à l’accès au financement pour le logement.
Pour la réalisation de cette étude, une enquête a été menée dans la région de Dakar du 21 juin 2019 au 14 juillet 2019, sur un échantillon aléatoire de 690 ménages (les zones connues pour être le lieu de résidence des ménages à revenus élevés ont été exclues du champ de l’enquête).
Globalement, les résultats suggèrent que les ménages à bas revenus de la région de Dakar sont majoritairement propriétaires (53%). Les locataires représentent 43%, et les autres statuts d’occupations (logés à titre gratuits et sous-location) 4%. Parmi les locataires, la majorité (68%) ont déclaré avoir des plans d’investissement dans le logement.
Cependant, l’analyse du profil des propriétaires montre que la moitié seulement ont obtenu leur logement à la suite d’un investissement (achat ou construction), l’autre moitié à la suite d’un héritage ou d’une donation.
Et parmi ceux ayant investi dans leur logement, le financement s’est fait dans la plupart des cas sur fonds propres : seuls 10% ont bénéficié d’un financement bancaire pour l’achat ou la construction de leur logement.
Vu l’importance que revêt l’accès à la propriété pour les locataires, il apparaît important de mettre en place des mesures pouvant faciliter l’investissement dans le logement. L’analyse des démarches d’investissement dans le logement, telle que présentée dans le rapport de l’étude, suggère qu’il faudrait, entre autres:
- Renforcer les capacités des promoteurs immobiliers à offrir une gamme plus diversifiée de logements et surtout à des prix plus abordables. Car les ménages qui ont choisi de construire plutôt que d’acheter un logement ont majoritairement indiqué l’avoir fait par souci d’économie (66%) ou parce qu’il leur était difficile de trouver sur le marché une « maison adaptée à leur besoin » (30%).
- Simplifier les procédures d’obtention du titre foncier et du permis de construire. La majorité des propriétaires de terrain n’ont que des titres provisoires pour leur terrain ou aucun titre du tout, et 46% de ceux qui construisent le font sans permis de construire. Cette situation les rend d’office inéligibles pour les crédits immobiliers offerts par les banques de la place.
- Trouver les solutions efficaces pour améliorer la qualité et faire baisser le coût des matériaux de construction sur le marché. Car le coût des matériaux de construction et le coût de la main d’œuvre arrivent largement en tête des difficultés rencontrées durant le processus de construction.
- Développer des produits de financement du logement adaptés pour les ménages travaillant dans le secteur informel. Ces ménages sont majoritaires parmi les ménages à bas revenus et sont d’office inéligibles aux crédits immobiliers actuellement offerts, vu que quasiment toutes les banques posent comme condition d’accès à ces crédits que les demandeurs doivent être salariés.