Financement du logement en Sénégal
Vue d'ensemble
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Malgré une forte croissance économique au Sénégal, la réduction de la pauvreté et des inégalités a été décevante au cours de la dernière décennie. Depuis 2001, le Sénégal a connu plusieurs périodes de forte croissance économique – dont récemment entre 2014 et 2019, avant le COVID-19. Les prévisions de croissance initialement fixées à 5,2% pour 2021, ont été revues à la baisse à 3,7% pour 2021 et 5,5% pour 2022. Cela est principalement dû à la résurgence du COVID-19 chez les principaux partenaires commerciaux du Sénégal et à la hausse des prix des matières premières.
L’urgence sociale, les inégalités croissantes et le manque de perspectives pour les jeunes, exacerbés par le COVID-19, ont été à l’origine de ce que l’on pourrait appeler « la contestation sénégalaise de mars 2021 ». Ces protestations sociales ont poussé le gouvernement à revoir ses priorités en matière de gestion de la pandémie et de lutte contre le chômage des jeunes, comme le « Programme d’urgence pour l’emploi et l’insertion économique des jeunes ». Le montant de ce programme, réparti uniformément sur la période 2021 à 2023, est de 3 % du produit intérieur brut (PIB). L’impact de la crise a également poussé le gouvernement à ajuster6 son Plan National de Développement. Cette nouvelle stratégie appelée Plan d’Actions Prioritaires Ajusté et Accéléré (PAP 2A) 2019-2023, prévoit de nouvelles mesures susceptibles de maintenir le pays sur la voie du développement. Avec un investissement prévu de 935,3 milliards FCFA (1,69 milliard USD), soit 7,7% du coût total dudit plan, le secteur de l’urbanisme et de l’habitat est un pilier essentiel du PAP 2A.
Pour en savoir plus sur le secteur du financement du logement au Sénégal, y compris les principales parties prenantes, les politiques importantes et l’abordabilité du logement:
- Introduction
- Accès à la finance
- Faisabilité budgétaire
- Offre de logements
- Marché immobilier
- Politique et réglementation
- Opportunités
- Accès aux données sur le financement du logement
- Informalité urbaine
- Sites internet
Sénégal
Introduction
Malgré une croissance économique élevée, la réduction de la pauvreté et des inégalités au Sénégal a été décevante au cours de la dernière décennie.[1] Depuis 2001, le Sénégal a connu plusieurs périodes de forte croissance économique -y compris récemment entre 2014 et 2019, avant la pandémie de la COVID-19.[2] Les prévisions de croissance, initialement établie à 5.2% pour l’année 2021, ont été revues à la baisse à 3.7% pour 2021 et 5.5% pour 2022.[3] Ceci est notamment dû à la résurgence de la COVID-19 chez les principaux partenaires commerciaux du Sénégal et la hausse des prix des produits de base.
L’urgence sociale, le creusement des inégalités et l’absence de perspectives pour les jeunes, exacerbées par la pandémie COVID-19, ont été à l’origine de ce qu’on pourrait appeler « la contestation sénégalaise de mars 2021 ».[4] Ces contestations sociales ont poussé le gouvernement à revoir ses priorités en termes de gestion de la pandémie et de solutions apportées au chômage des jeunes, comme le « Programme d’urgence pour l’emploi et l’insertion économique des jeunes »[5] (dont le montant répartit uniformément sur la période de 2021 à 2023 s’élève à 3% du PIB).
L’impact de la crise a poussé également le gouvernement à ajuster[6] son Plan national de développement. Cette nouvelle stratégie dénommée Plan d’Actions Prioritaires Ajusté et Accéléré (PAP 2A) 2019-2023, vient corriger et apporter de nouvelles mesures susceptibles de maintenir le pays sur la trajectoire d’émergence. Avec un investissement prévu à hauteur de 935.3 milliards FCFA[7] (1.69 milliards US$), soit 7.7% du cout total dudit plan, le secteur de l’urbanisme et de l’habitat est un pilier essentiel du PAP 2A.
Le Sénégal connaît une forte croissance urbaine allant de pair avec une pression accrue sur le développement d’infrastructures, d’équipements et de services ainsi que la production de logements. La région de Dakar concentre à elle seule près de 50% de la population urbaine du pays. Il est attendu que ce rythme de croissance se maintienne et que 65% des habitants du Sénégal soient urbains d’ici 2050 (contre 23% en 1960 et 49%[8] en 2021).
Pour trouver une solution aux contraintes empêchant l’accès à un logement digne en grand nombre et à des prix abordables (notamment les difficultés financières et opérationnelles, la sécurisation du foncier et l’aménagement des sites), l’État du Sénégal déroule depuis 2017, un ambitieux programme de construction de 100 000 logements sur cinq ans. A cet effet, la réunion présidentielle sur le financement du logement tenue le 26 février 2021, constitue un tournant décisif dans la politique de l’habitat social. A cette occasion, des directives présidentielles importantes ont été émises dans le sens du déploiement rapide et harmonieux du projet. Il s’agit, entre autres de la redynamisation des coopératives d’habitat, la promotion de la construction en hauteur, la territorialisation du projet et l’absence d’apport pour les acquéreurs.
[1] Calculs des services de la Banque mondiale à partir des enquêtes harmonisées PovCalNet 2020 et Macro Poverty Outlook Fall 2019 pour l’évolution entre 2011 et 2018
[2] World Bank (Mai 2021). Senegal Cadastre and Land Tenure Improvment Project. (Consulté le 31 juillet 2021) Page 7
[3] Fonds Monétaire International (Avril 2021). Communiqué de presse n° 21/177. https://www.imf.org/en/News/Articles/2021/04/29/pr21117-senegal-imf-staff-reach-agreement-on-3rd-review-pci-and-new-18-month-financing-arrangement (Consulté le 19 aout 2021)
[4] Smith, Etienne. « La contestation sénégalaise de mars 2021 : une crise politique ? Entretien avec Etienne Smith. Avril 2021. Esquisse les Afriques dans le monde. https://elam.hypotheses.org/3374 (consulté le 19 aout 2021)
[5] Ministère de l’Economie, du plan et de la coopération. (Juin 2021) Programme d’Urgence pour l’insertion socio-économique et l’Emploi des jeunes. https://www.economie.gouv.sn/sites/default/files/2021-08/OK_Brochure_Xeyu_Ndaw_Gni-version-finale-160621_compressed_VF.pdf (consulté le 31 juillet 2021) Page 1
[6] Ministère de l’Economie, du Plan et de la Coopération. Plan d’Actions Prioritaires 2 Ajusté et Accéléré (PAP 2A). https://www.economie.gouv.sn/sites/default/files/2021-04/PAP2_FINAL_VFINALE_14_12_WEB.pdf (consulté le 28 juillet 2021) Pg. 6
[7] Ministère de l’économie, du plan et de la coopération. Plan d’Actions Prioritaires 2 Ajusté et accéléré (PAP 2A) https://www.economie.gouv.sn/sites/default/files/2021-04/PAP2_FINAL_VFINALE_14_12_WEB.pdf (Consulté le 28 juillet 2021). Pg 39
[8] USAID. (2021). ForeignAssistance.gov. https://explorer.usaid.gov/cd/SEN (Consulté le 1 aout 2021)
Accès à la finance
Le réseau bancaire du Sénégal compte 26 banques[1] et 4 établissements financiers en 2021. Cela consolide la place importante du Sénégal dans le dynamisme financier de l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA).
Différents acteurs interviennent dans le financement du logement abordable : l’État (via les instruments de subvention), les partenaires techniques et financiers (Don IDA à travers le PFLA UEMOA, le Qatar, l’Agence Française de Développement (AFD), la Banque de l’Habitat du Sénégal (BHS), les banques commerciales, les coopératives d’habitat à travers leur épargne, et les institutions de microcrédit à travers de petits crédits successifs à l’auto-construction.
La BHS, acteur historique du financement de la politique de logement, porte un encours de crédits à la clientèle de 5.25 milliards FCFA[2] (9.5 millions US$) en 2020 contre 4.87 milliards FCFA (8.8 millions US$) en 2019. En ce qui concerne la quotité, elle varie en fonction des revenus des bénéficiaires. La catégorie de clientèle définit les taux d’intérêts pratiqués par les banques. Il est en moyenne de 7.5% auprès d’autres banques pour les particuliers et évolue à la BHS entre 5.5 et 9%[3] pour la même catégorie.
Au Sénégal, les établissements financiers, bien qu’éprouvant de réelles difficultés, arrivent à financer des prêts hypothécaires à travers leurs dépôts, la BCEAO et la Caisse Régionale de Refinancement Hypothécaire de l’UEMOA. La durée maximale des prêts hypothécaires résidentiels est de 25 ans et 29 fournisseurs de prêts hypothécaires sont répertoriés en 2021.[4] Les organismes de financement peuvent également aujourd’hui, dans une moindre mesure, bénéficier des instruments de subvention mis en place par l’État du Sénégal, à savoir : le Fonds de Garantie pour l’Accès au Logement (FOGALOG) et le Fonds pour l’Habitat Social (FHS). Ces fonds, créés depuis 2016, ont été opérationnalisés en juin 2020, pour le FHS. Ils sont alimentés par une contribution des cimentiers sur la vente du ciment (2%), la taxe parafiscale, l’essence ordinaire et le gasoil, les subventions de l’État, des dons et legs et par toutes autres ressources provenant de conventions de financements destinés à la promotion de l’habitat social.
Le secteur de la microfinance est dynamique et fournit des services financiers à toutes les catégories de sénégalais dans les zones urbaines et rurales du pays. Le nombre de services financiers décentralisés est passé de 304 en 2019 à 294 en 2020[5]. Dans le premier trimestre de 2021, le secteur a enregistré un encours de crédit de 477 milliards FCFA (862.6 millions US$), des dépôts de 395 milliards FCFA (714 millions US$) et 97 278 bénéficiaires sur les 119 milliards FCFA (215 millions US$) de volume de crédit octroyé. La microfinance est considérée comme un prêt à l’amélioration de l’habitat. Les montants octroyés sont limités et les octrois se font sur des périodes de remboursement relativement courtes (entre deux et cinq ans) par rapport à des prêts hypothécaires.
Pour conforter la reprise économique en cours, la BCEAO a ouvert en août 2021 « un Guichet Spécial de Refinancement »[6]pour aider les gouvernements de l’UEMOA à faire face aux besoins de financement de la relance COVID. Le montant des obligations éligibles au nouveau guichet de refinancement pour le Sénégal est équivalent à 4% du PIB prévu pour 2021.
[1] BCEAO. (2020). Paysage bancaire au 31 Décembre 2020. https://www.bceao.int/sites/default/files/2021-07/Rapport%20sur%20les%20conditions%20de%20banque%20dans%20l%27UEMOA%20en%202020.pdf . (Consulté le 6 aout 2021). Pg.7
[2] Correspondance par e-mail avec Monsieur Mamadou GUEYE, Conseiller Technique du Directeur Général de la Banque de l’Habitat du Sénégal, 12 août 2021.
[3] Correspondance par e-mail avec M. Mamadou GUEYE, conseiller technique du Directeur Général de la BHS, 12 août 2021.
[4] Entretien avec Monsieur Babacar Ndiaye. Banque de l’Habitat du Sénégal (BHS). Directeur de la plateforme des crédits immobiliers, le 10 aout 2021, Dakar.
[5] Ministère des Finances et du Budget. Direction Réglementation et Supervision des SFD. Rapport Annuel 2020. https://drs-sfd.gouv.sn/sitedrs/index.php/2021/05/19/rapport-annuel-2020/ (consulté le 6 aout 2020). Pg. 30
[6] BCEAO. (août 2021). Avis n° 003-08-2021 relatif à l’ouverture d’un Guichet Spécial de Refinancement. https://www.bceao.int/fr/reglementations/avis-ndeg-003-08-2021-relatif-louverture-dun-guichet-special-de-refinancement-12(Consulté le 19 aout 2021).
Faisabilité budgétaire
Les répercussions de la pandémie de la COVID-19 ont retardé les premières réalisations du programme des 100 000 logements. Les 200 logements en phase de livraison, sur le site de Bambilor, ayant une valeur unitaire maximum de 12 millions FCFA (21 690 US$), attendus au second trimestre de 2021, sont reportés jusqu’à la fin de cette année. Dans un contexte de semi-confinement, les ménages locataires résidant à Dakar et particulièrement ceux qui tirent l’essentiel de leurs revenus du secteur informel et du secteur privé auraient plus de difficultés à s’acquitter des dépenses comme la location, à cause des pertes de revenus liée à la pandémie de la COVID-19.
En se basant sur les revenus déclarés des ménages enquêtés au Sénégal en 2019 par le CAHF, et en prenant l’hypothèse d’une échéance de remboursement mensuelle de 88 627 FCFA (160 US$), un ménage devrait disposer d’un revenu mensuel minimum de 295 000 FCFA (533 US$) afin de respecter un engagement maximal de 30% de son revenu. Les 26% les plus pauvres seraient ainsi exclus de l’accès au logement, faute de ressources suffisantes. Et sur application du seuil de revenus nécessaire pour bénéficier d’un logement social (inférieur ou égal à 450 000 FCFA (813 US$), 43% des ménages se situeraient à la limite de ce seuil et seuls 26% disposeraient des ressources nécessaires. Enfin, les 6% les plus riches dépassent les seuils d’éligibilité au logement social. La maison nouvellement construite en 2021 par un promoteur ou entrepreneur la moins chère et située dans une zone urbaine est de 16 500 000 FCFA (29 825 US$) et reste inaccessible pour la majorité des Sénégalais.[1]
Le modèle de développement du secteur, à travers les pôles urbains, la stratégie « hors pôle » (consistant à mobiliser du foncier pour le logement dans les collectivités territoriales), le régime fiscal incitatif mis en place pour les promoteurs et les acquéreurs de logements, les premiers résultats du Fonds de Garantie pour l’Accès au Logement (FOGALOG) devraient contribuer à atténuer le déséquilibre et soutenir le caractère abordable du logement. Plus encore, à travers le Fonds pour l’Habitat Social (FHS), un instrument de solvabilisation des primo-accédants à revenus irréguliers ou faibles, les acquéreurs à revenus modestes ou informels bénéficieront d’un dispositif de garantie et de bonification.
[1] Entretien avec différents groupes de promoteurs (Teyliom Akys – Physalis – SICAP lac rose) qui ont engagé des constructions achevées ou en cours en périphérie de Dakar, tenue les 3 et 4 février 2021.
Offre de logements
La difficulté du marché financier fait que peu d’opérateurs investissent dans la construction de logements abordables à Dakar et dans sa proche banlieue. 80% des demandes de prêts au secteur bancaire pour les TPE et les PME sont refusées faute de collatéral.[1]
L’accès à la propriété, constitue l’un des marqueurs d’une insertion sociale réussie. Les dépenses consacrées au logement constituent le deuxième poste de dépenses des ménages sénégalais, derrière celles consacrées à l’alimentation.[2] La maison basse constitue le type de logement le plus fréquent dans la structure de l’habitat au Sénégal, quel que soit le milieu de résidence. En effet, au niveau national plus de six ménages sur dix résident dans des maisons basses. Dans les autres centres urbains et au niveau de la zone urbaine de Dakar, cette proportion s’établit à 81.9% et à 45.4% respectivement contre 70.0% pour les ménages ruraux.[3] L’importance, toutefois de maisons à étage dans la région urbaine de Dakar montre qu’un ménage sur deux occupe ce type de logement et que 3.6% des ménages occupent un appartement dans un immeuble tandis que 24.0% des ménages ruraux résident dans des cases.
Malgré les efforts permanents de l’État, le déficit de logements est chronique si l’on en juge par la prolifération des habitats précaires et la hausse continue des loyers et des prix du foncier. Le nombre important d’habitat irrégulier, l’absence de planification urbaine et de titres fonciers, la multitude de parcelles de petite taille et le bâti irrégulier, des rues étroites et des voiries ensablées sont les principales caractéristiques de quartiers précaires de l’agglomération dakaroise. Ces quartiers sont fréquemment situés dans des zones inondables.
Deux promoteurs publics existent au Sénégal : la SNHLM et la SICAP. Ces structures publiques ont fortement contribué au développement du logement au Sénégal et à Dakar en particulier et à cet effet disposent d’une forte confiance des populations. Cependant, il semble que l’appui de l’État auprès de ces structures ait considérablement diminué. Elles connaissent en plus, une forte concurrence de la part de nouveaux acteurs en recherche d’efficacité comme l’Institut de Prévoyance Retraite du Sénégal (I.PR.E. S) et la Caisse des Dépôts et Consignations à travers sa filiale immobilière CGIS SA. Ceci explique la production annuelle qui atteint à peine 600 unités de logements pour les deux promoteurs publics réunis.
La stratégie adoptée par les autorités pour résorber ce déficit et impulser une importante production de logements, est matérialisée par le projet étatique des 100 000 logements. Cependant, ce programme tarde à connaître une véritable impulsion. Il faut toutefois noter que des avancées ont été faites en termes de structuration technique et administrative.
Le pôle urbain de Daga kholpa, située à côté de la ville nouvelle de Diamniadio, joue un rôle essentiel dans cette nouvelle stratégie. Il prévoit la réalisation de 61 000 logements sur une surface de 12 000 hectares destinés à l’habitat (dont 60% de la superficie dédiée à l’habitat social et 40% destinée aux projets de logements haut de gamme). Ce pôle bénéficie de l’appui d’une société d’aménagement, la SAFRU SA. Ce pôle servira également de solutions pour la forte demande de la diaspora sénégalaise en terrains aménagés et en propriété finie. Pour l’heure, 50 hectares sont mobilisés sur un site de la commune de Bambilor afin d’ériger la « cité diaspora », partie intégrante du programme 100 000 logements. Ce dernier, attire l’intérêt d’investisseurs et de promoteurs étrangers. En effet, pour combler le retard des résultats de ce programme, le Groupe Emirates Gate Investment (EGI) s’engage à construire 50 000[4] logements en deux ans.
[1] Centre for affordable Housing Finance in Africa. Annuaire 2014 sur le financement du logement abordable en Afrique. Profil du Sénégal. (Consulté le 6 aout 2021).
[2] ANSD. (2020). Deuxième Enquête de Suivi de la Pauvreté au Sénégal (ESPS-II 2011)
https://satisfaction.ansd.sn/ressources/rapports/Rapport_ESPS-2011.pdf (consulté le 07 aout 2021). Pg. 23
[3] ANSD. (Septembre 2021). Enquête harmonisée sur les conditions de Vie des Ménages (EHCVM) au Sénégal. Rapport final. http://www.ansd.sn/ressources/publications/Rapport-final-EHCVM-vf-Senegal.pdf (consulté le 19 septembre 2021)
[4] AML Services. (août 2021). Le Groupe Emirates Gate Investment propose de construire 50k logements. https://aml-services.org/actu-immo-senegal/mulhp-egi/ (consulté le 17 aout 2021)
Marché immobilier
L’immobilier est incontestablement l’un des secteurs les plus dynamiques au Sénégal avec l’activité du logement qui générerait plus de 200 milliards FCFA (362 millions US$) par an. Le dynamisme du secteur s’est relativement estompé avec la pandémie de la COVID-19, illustré par la diminution de l’effectif des emplois salariés dans le secteur, passant de 1 156 au deuxième trimestre de 2020 à 880 au quatrième trimestre de la même année.[1] Cependant, l’activité devrait être confortée par le début de la phase accélérée du Programme 100 000 logements sur le site de Bambilor, la construction en cours de 28 000 logements en périphérie de Dakar et à l’intérieur du pays[2], la poursuite des aménagements du pôle urbain de Diamniadio ainsi que les programmes d’habitat social (démarrage imminent du pôle urbain de Daga Kholpa), la redynamisation des instruments publics de production de logements (SNHLM, SICAP SA). Cette poussée de développement est soutenue par un contexte plus optimiste sur le marché résidentiel.
En 2021, la demande reste supérieure à l’offre sur le marché de l’immobilier. Le Ministère de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène Publique (MULHP), avait par ailleurs annoncé un déficit de 325 000 unités de logements qui devrait augmenter de 10% chaque année.
Au Sénégal, plus de 7 ménages sur 10 sont propriétaires de leur logement : 39% sont des propriétaires avec titre et 31.8% sont propriétaires sans titre. Les locataires représentent 17.8% des ménages. Par contre, une fraction de ménages est logée gratuitement soit par des parents ou amis (7.3%) soit par leur employeur (0.4%).[3] Le marché immobilier de Dakar est l’un des plus contraignants pour les citadins pauvres qui se trouvent exclus du « droit à la ville ». En effet, la moyenne d’un loyer mensuel dans un appartement nouvellement construit est de 139 308 FCFA (251 US$) aux cinq premiers mois de 2021.[4] La hausse est plus nette si on regarde des périodes de temps plus importantes : un bien qui était loué à 150 000 FCFA (271 US$) par mois en 2014 est maintenant loué à 350 000 FCFA (632 US$).[5] Cette situation est également due aux intérêts de riches investisseurs de la sous-région qui achètent des terrains au Sénégal du fait de la stabilité politique du pays.
L’augmentation constante et exponentielle des prix du m² est un facteur aggravant pour l’inaccessibilité du logement pour le plus grand nombre. En effet, les prix du m² dans les zones urbaines de Ndiakhirate, Diass et Thiès Mont-rolland s’élèvent respectivement à 17 000 FCFA (30 US$), 14 000 FCFA (25 US$) et 3 333 FCFA (6 US$).[6]
En raison des cadres juridiques dépassés et de procédures administratives coûteuses, les titres de propriété sont inaccessibles à la majorité de la population. Même dans les zones urbaines où le cadre juridique a pu être modifié par la loi de 2011 sur la propriété foncière, de lourdes procédures administratives subsistent, ce qui signifie que peu de titres de propriété ont été délivrés (environ 150 000 en 2014).[7] Les Bureaux de conservation de la propriété et de droit foncier jouent un rôle fondamental dans l’implémentation des services relatifs à l’enregistrement de propriété. 749[8] titres de propriété ont été créés par le service de Ngor Almadies entre janvier et août 2021. La pluralité de structures intervenant dans la procédure de délivrance des titres de propriété rend pénible l’enregistrement foncier. Cependant, la mise en place d’un bureau des collectivités locales au sein du ministère des finances (ayant pour mission d’aider les municipalités à gérer leurs terres et à promouvoir leur autonomie financière) et l’existence d’une plateforme nationale multi-acteurs sur la gouvernance foncière, témoignent de la volonté de l’État du Sénégal d’apporter des solutions à cette question. De plus, le Projet d’Amélioration du Cadastre et des Régimes fonciers au Sénégal (PROCASEF), financé par la Banque mondiale à hauteur de 80 millions US$ pour la période 2021-2026, va à terme moderniser le secteur du foncier rural et périurbain sénégalais.
Ces éléments expliquent une amélioration de la position du Sénégal dans le rapport Doing Business sur l’enregistrement d’un bien (41 jours en dessous de la moyenne de 51.6 jours en Afrique subsaharienne). Des efforts considérables restent à faire, si on sait que des pays comme le Niger, le Togo et la Côte d’Ivoire font beaucoup mieux.
[1] ANSD. (2021). Bulletin Mensuel des Statistiques Economiques et Financières d’avril 2021.
http://www.ansd.sn/ressources/publications/Bulletin_Avril_2021.pdf p. 56 (consulté le 10 aout 2021)
[2] Le Monde. (Septembre 2021). Sénégal : les loyers explosent à Dakar. https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/09/03/senegal-les-loyers-explosent-a-dakar_6093324_3212.html (Consulté le 3 Septembre)
[3] ANSD. (Septembre 2021). Enquête harmonisée sur les conditions de Vie des ménages. Rapport final. http://www.ansd.sn/ressources/publications/Rapport-final-EHCVM-vf-Senegal.pdf (consulté le 19 Septembre) Page 94
[4] ANSD. (2021). Bulletin mensuel des Statistiques Economiques et Financières de juin 2021. https://satisfaction.ansd.sn/ressources/publications/Bulletin_JUIN_2021_VALIDE.pdf (Consulté le 9 aout 2021). Page 56
[5] Le Monde. (Septembre 2021). Sénégal : les loyers explosent à Dakar. https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/09/03/senegal-les-loyers-explosent-a-dakar_6093324_3212.html (Consulté le 3 Septembre)
[6] Entretien avec Ahmet Lo, Fondateur de AML SERVICE, plateforme dédiée à la publication de données du marché immobilier au Sénégal, tenue le 13 aout 2021.
[7] World Bank. International Development Association (IDA). Project Appraisal Document. Senegal Cadastre and Tenure Improvement Project. pdf (Consulté le 11 aout 2021). Pg. 11
[8] Entretien téléphonique avec El hadji Mansour Diop, Bureau de Conservation de la Propriété et de Droit foncier de Ngor-Almadies, tenue le 20 aout 2021, Dakar
Politique et réglementation
Aux côtés de l’auto-construction, à l’origine de 80%[1], du parc de logements, ce sont les sociétés immobilières parapubliques, les promoteurs privés, les coopératives d’habitat qui produisent le logement au Sénégal. L’État ne construit pas de logements mais se limite à un rôle d’impulsion, d’orientation, d’encadrement et de régulation du secteur.
À partir de 1980, les décideurs politiques du Sénégal ont mis en place des instruments spécifiques destinés à l’habitat social. Des réformes importantes sur le financement du logement ont vu le jour avec la création du Fonds pour l’Amélioration de l’Habitat et de l’Urbanisme (FAHU) en 1977 et de la BHS en 1979 ayant comme principal mission le financement de l’immobilier.
Aujourd’hui, avec les nouvelles orientations stratégiques de la politique en matière d’habitat, l’intervention de l’État se limite et porte sur certains aspects liés au foncier, au financement et à la fiscalité.
La création de la Société d’Aménagement Foncier et de Rénovation Urbaine (SAFRU), du Fonds de l’Habitat Social, du FONGIP/FOGALOG, sont plus que jamais des instruments publics, appelés à accompagner et à concrétiser la volonté étatique de proposer aux sénégalais des logements sociaux et économiques.
La mise en œuvre en juillet 2021 d’un guichet unique auprès du ministre de l’urbanisme, du logement et de l’hygiène publique, constitue un réel complément du dispositif déjà existant. Cet outil va considérablement soulager les procédures et formalités administratives décriées par les usagers du service public en raison de leur lourdeur et de leur complexité surtout en matière foncière et fiscale. Plus encore, la réforme du code de l’urbanisme et de la construction lancée en février 2021 va naturellement intégrer et prendre en compte les directives présidentielles pour une meilleure mise en œuvre de la politique du logement.
[1] Banque Mondiale. (2015). Perspectives urbaines, villes émergentes pour un Sénégal émergent. https://documents1.worldbank.org/curated/en/900681468197983382/pdf/ACS14161-REVISED-FRENCH-WP-P124695-PUBLIC-Senegal-Urbanization-Review.pdf (Consulté le 11 aout 2021).Pg. 20.
Opportunités
Selon le rapport Doing Business 2020, le Sénégal est l’un des pays d’Afrique Subsaharienne qui ont le plus progressé dans l’amélioration de l’environnement des affaires (123e en 2020 contre 141e en 2019).[1]
Les pôles urbains et la politique de la modernisation des villes représentent une opportunité pour améliorer la provision et la qualité de l’habitat.
Avec un fort appui de l’État, les promoteurs et investisseurs devraient explorer le marché du logement locatif. Ce dernier est une nécessité pour les jeunes adultes et les ménages à revenus faibles ou informels. En effet, le logement locatif formel offre une possibilité d’offrir des logements abordables à tous. Cependant, le gouvernement pourrait et devrait élaborer un cadre réglementaire bien articulé, stable et exécutoire qui rendrait le marché locatif beaucoup plus attrayant pour les investisseurs institutionnels et privés.
Une mise à disposition par l’État d’assiettes foncières viabilisées, favorisant l’auto-construction serait une opportunité à explorer considérant l’intérêt que les populations ont à être eux-mêmes les propres artisans de leurs logements. Considérant toujours l’importance de l’auto-construction, il serait pertinent d’ouvrir les dispositifs de l’État (par exemple, dans le cadre du programme 100 000 logements) à des promoteurs sociaux à but non lucratif. En outre, il est convenable de soutenir le secteur de la microfinance à l’habitat et d’autres formes de financement « non formelles ».
[1] Banque Mondiale. (2020). Rapport Doing Business. Profil du Sénégal. https://francais.doingbusiness.org/fr/data/exploreeconomies/senegal# (consulté le 6 aout 2021)
Accès aux données sur le financement du logement
L’insuffisance et l’inexactitude des informations de marché constituent des contraintes majeures qui ralentissent la production de logements en grand nombre et, par ricochet, entretiennent la frilosité des prêteurs d’engager des projets d’envergure de construction. Au Sénégal, les données proviennent de plusieurs institutions nationales et internationales.
L’ANSD, le grand pourvoyeur de données dans le pays, collecte et publie ses données à travers des recensements, des enquêtes auprès des ménages, et des études monographiques. Y suivent les structures administratives de l’urbanisme, de la construction et de l’habitat, du cadastre, des finances, ainsi que des institutions privées comme la BHS (qui collecte ses données auprès des promoteurs et des clients bénéficiaires de prêts), les sociétés d’investissements, les promoteurs immobiliers.
L’UEMOA, dans l’optique d’accompagner les politiques à l’échelle nationale, mais aussi d’appuyer la mise en œuvre de projets de production de logements sociaux et d’aménagement de terrains urbains pour les citadins pauvres, a mis en place un Centre d’Excellence de l’Habitat. Ce dernier fonctionnera comme une plateforme dynamique de production et d’échanges de données sur le logement qui permettent de produire des rapports nationaux sur le logement de façon régulière (tous les 2 ou 3 ans).
Informalité urbaine
Le Sénégal est un pays urbanisé à 49% en 2021 avec un taux de croissance de la population de l’ordre de 3% en 2020. L’étalement urbain aggravé par la pénurie de logement, la forte pression foncière, notamment dans la région de Dakar, et le développement anarchique du territoire mènent à l’informalité urbaine : 30% de la population sénégalaise vie dans des quartiers informels ou précaires. Bien que d’importants efforts aient été réalisés, l’accès à l’eau potable et à l’assainissement n’est pas encore généralisé. L’accès est quasi universel dans la zone urbaine de Dakar (97.0%) et dans une moindre mesure en milieu urbain des autres régions (82.0%).
Le Sénégal a engagé plusieurs réformes pour faciliter l’accès au logement à travers une transformation du paysage urbain : le « Programme Zéro Bidonvilles », déroulé depuis 2018, est un programme intersectoriel et pluri institutionnel qui vise l’amélioration du cadre et des conditions de vie de plus de 4 millions de personnes, soit plus de 500 000 ménages habitant dans les bidonvilles, avant 2035.
Sites internet
Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) www.ansd.sn
Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) www.bceao.int
Direction de la Prévision et des Études Économiques www.dpee.sn
Direction de la Réglementation et de la Supervision des Systèmes Financiers Décentralisés (DRS-SFD) www.drs.sfd.gouv.sn
Direction de la microfinance www.microfinance.sn
Fonds de Garantie des Investissements Prioritaires www.fongip.sn
Société d’Aménagement Foncier et de Rénovation Urbaine www.safru.sn